Lumière sur le projet « Lunaawaa », 1er prix du PIEED 2016 !

Capturecivd2Lauréate du premier prix du PIEED 2016, l’association CIVD nous dévoile l’expérience de son projet Lunaawaa à travers leur participation au concours. Une action d’éducation à la citoyenneté et la solidarité internationale (ECSI) réussie pour inspirer nos futurs candidats…

Je rappelle que vous êtes les lauréates du premier prix du PIEED 2016 pour votre projet Lunaawaa. Mais d’ailleurs Lunaawaa ça veut dire quoi ?

Gabrielle : Lunaawaa c’est un mot inventé par Maria. « Luna » comme lune ça se rapporte à la féminité, sachant que le soleil représente la masculinité dans beaucoup de cultures indigènes. Et « agua » c’est l’eau. Donc ces deux mots liés à la féminité sont mis ensemble – « luna » et « agua » – et avec l’accent d’Amérique Latine, « agua » devient souvent « awa ».

Est-ce que vous pourriez nous décrire le projet en une phrase ?

Maria : Il s’agit de questionner le regard que porte l’occident sur les cultures indigènes à travers l’art et le numérique. 

Vous pouvez nous parler des partenaires que vous avez eu sur place, ou qui vous ont aidées à rencontrer des personnes utiles au projet ?

Gabrielle : En fait on a rencontré au cours du projet des personnes utiles qui n’étaient pas nos partenaires de départ. Mais dans les partenaires il pouvait aussi bien y avoir nos guides, les gens avec qui on mangeait ou dormait, qui nous aidaient au quotidien. Par exemple on pensait vraiment qu’avec une association on allait avoir un partenariat très solide et qu’ils allaient nous servir de guides dans le désert, parce qu’on savait que le désert c’était très compliqué d’accès et même dangereux. On avait signé une charte avec eux. Et puis finalement quand on est arrivé, ils n’étaient plus là. Mais une fois sur place on a pu rencontrer quelqu’un d’autre, qui nous a donné presque tout ce dont on avait besoin pour cette étape. Donc on l’a rappelé pour lui dire que c’était bon.

Gabrielle : On est aussi arrivées au moment du traité de paix, entre les FARC et l’Etat colombien. Donc nos partenaires de Bogotá, Bogota Sin Asco, avaient un peu la tête ailleurs. Ils étaient sur ce camps-là à fond. Au final on s’est retrouvées assez seules. De plus on n’avait pas les moyens de les faire se déplacer avec nous. Le projet représentait trop d’argent pour nos partenaires de ce côté-là, et on n’avait pas prévu ça dans le budget.

Et Bogota Sin Asco, ils avaient des contacts plutôt établis avec les communautés … ?

Maria : Non, ils travaillent surtout sur d’autres thématiques, comme avec un collectif féministe d’anthropologues. C’est pourquoi ils voulaient nous aider à créer des articles là-dessus sur notre site. En fait on a d’abord rencontré Bogota Sin Asco et noué des liens avec eux sur Facebook. On avait passé des mois à se voir sur Skype, car quand tu as un projet à l’international et que tu ne peux pas souvent bouger sur place, tu dois au début te contenter de moyens alternatifs. En ce moment on a un peu fait une pause avec eux parce qu’il faut aussi qu’on avance sur le montage des images. Après quand on aura matérialisé ces idées, on pourra commencer à gérer tout ça à nouveau.

Pourquoi avez-vous fait le choix de l’art pour parler de l’Education à la citoyenneté et la solidarité internationale, et pourquoi cette démarche vous parait originale et pertinente dans ce projet ?

Gabrielle : L’art c’est une émotion, c’est le sensible. C’est ce qui te donne la chair de poule, tout ce qui est physique et que tu vis là. On avait une idée artistique qu’on avait besoin de réaliser. L’ECSI s’est montré être une voie pour développer le projet de manière plus profonde, mais ce n’est pas vraiment apparu comme un choix de départ.  Et c’est grâce à l’accompagnement qu’on a développé le projet pour que ça devienne de l’ECSI. Au final pourquoi l’art pour parler d’ECSI ? Tout simplement parce qu’il y a des gens qui sont ingénieurs et donc formés en ingénierie alors que nous notre outil de dialogue c’est l’art.

Mais pour nous ce ne sont pas toutes les formes d’art qui sont activistes, l’art peut servir pour tout. Il y a des gens qui peuvent utiliser l’art pour faire de la publicité aussi, comme avec de belles photos qu’on peut voir dans le métro. Et les gens ne se rendent peut-être pas compte de l’importance de l’art dans leur vie quotidienne. Moi je pense que c’est aussi l’ECSI qui nous est tombé dessus comme une évidence. Bref nous on n’est pas Ingénieurs sans frontière, ni Médecins sans frontière, mais Artistes sans frontières !

Et par exemple une des formes de diffusion du projet qu’on aimerait développer ce sont les ateliers d’impro théâtrale, comme on avait fait au WEEeD [voir l’article sur la soirée Remue-Méninges du WEEeD 2016]. Là c’est pareil, on utilise une forme artistique qui serait le théâtre pour parler de ce thème. Et puis on prépare une expo photo aussi, avec des photos « en mouvement », qui ne seraient pas simplement plaquées contre un mur blanc.

Mais le thème visait dès le départ à démystifier la représentation des cultures indigènes en Colombie ?

Maria : Le thème n’a pas changé. On voulait que ce soit un projet qui apporte à la solidarité internationale, à l’ECSI. Dès le départ notre projet visait les femmes, les cultures indigènes, les Wayuus, on voulait détruire les codes et clichés là-dessus et faire réfléchir. Par exemple la plupart des documentaires qu’on voit à la télé sur des indigènes ne sont pas activistes, la plupart ne sont pas engagés pour une cause, et ne cherchent pas à changer la vision de départ sur cette thématique.

Dernière question en tant que candidates, finalistes et lauréates : quel petit conseil vous auriez à donner à nos futurs candidats ?

Gabrielle : Allez à toutes les CAP [Commissions d’Appui au Projet organisées par Etudiants et Développement ! [voir toutes les informations et les formulaires inscriptions]. Et sinon, je dirais que développer une dimension d’ECSI pousse à l’intelligence, et à la critique. Ça permet d’aller plus profondément dans une thématique et à ne pas juste rester en surface.